Les lois humaines passent souvent loin de la justice. En effet, se luttant pour le trône de Thèbes, deux frères s’entretuaient, Étéocle en défendant le royaume contre son frère, Polynice, à la tête d’une armée ennemie. Le Roi de la cité veut honorer la mémoire du premier, et interdit des obsèques au second. Contre les règles établies, Antigone, soeur des défunts recouvre le cadavre de Polynice en un rituel funéraire et désobéit alors aux lois du royaume. La jeune rebelle est réprimandée, bousculée par le Roi. Elle refuse de regretter ses actes et fait comprendre que les lois naturelles sont immuables, éternelles, inaliénables et meilleures que celles des hommes jusqu’à se laisser frapper d’une condemnation royale, son rejet de la ville vers une mort honteuse.

La justicière et le juste

Obéir aux lois n’est pas toujours une chose logique. Certaines, de toute évidence, sont contraires aux valeurs fondamentales. Une loi peut être légale mais illégitime. La justice humaine bafoue souvent la justice sociale, celle supra-humaine. Quelle loi faut-il respecter alors? Antigone, dans son combat, nous dit que seule la loi justifiable,  fondée sur les libertés inaliénables de l’être, conforme aux lois naturelles inhérentes à la personne humaine méritent le respect, l’obeïssance des hommes. D’où une attitude justicière. Si socrate, le juste par excellence, refuse d’enfreindre une loi à cause de sa légalité, ce dernier développe une idée supercifielle de la notion de justice, un homme n’impose pas ses caprices aux autres membres du corps social par le prétexte de la légalité d’une loi, car s’il faut sacrifier sa liberté individuelle, il est nécessaire que ce soit au nom de son bien être dans le collectif et, surtout, quand de telle décision est teintée de préjugés, de sexisme, le devoir de désobéir s’impose.

La place du machisme dans la traine du drame.

Le roi dans sa réflexion, face à l’évidence de sa dérive, se justifie de ne pas céder face à une femme, ce serait de son avis la preuve d’une grande faiblesse. Un mauvais précedent. La loi sort de la bouche du souverain, il ne cède point face aux hommes, voire aux femmes, soutient ce dernier. Il faut confirmer la sentence. Devoir de virilité!

Le plaisir du texte, le drame pour dire la vie

D’une écriture splendide, le drame est raconté avec douceur, chaque mot apporte son soleil et semble tenir la main du lecteur pour le conduire vers des beaux paysages intérieurs; le coeur de l’homme et ses côtés sombres sont exposés avec sagacité. Les mots ont l’air des caméras saisissant l’image de l’âme en détresse dans un écrit où divinités et humains sont des pièces sur un même échiquier. Le jeu, au destin! Ce texte, venu de l’antiquité grecque, sous la plume de Sophocle, reste une ébauche de desobéissance civile fondamentale, la première goutte qui fait pousser l’arbre de la rebellion. Faut-il se soumettre aux désirs des autres tranformés en lois?  Quelle serait donc la vraie source de la loi, la volonté des hommes ou les inaliénables libertés fondamentales de l’être? De quoi dépend la validité d’une norme?

Wogensky LAGUERRE
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